Face Sud-Est des Petites Jorasses – Voie Bonatti/Mazeaud – Sortie Arête Sud (500m, TD+, 6c)

Dimanche 11 août 2019, en compagnie de l’alpiniste Olivier VIGOUROUX, nous avons profité du très court créneau météo pour aller grimper dans le versant italien du massif du Mont-Blanc.

Notre choix s’est porté sur le très beau granit de la face Sud-Est des Petites Jorasses (3650 m). Cette paroi est parcourue de nombreux itinéraires (Pantagruel, Gargantua, etc…). La première à y être tracée date de juillet 1962. Fruit d’une amitié alors toute récente, née l’année précédente lors de l’une des plus grandes tragédies de l’histoire de l’Alpinisme, nous la devons à deux légendes de l’Alpinisme: W. BONATTI et P. MAZEAUD (après une première tentative de ce dernier en juin 1960 avec J. ALZETTA).

Dans le superbe dièdre de notre 3ième longueur :

La photo suivante montre le tracé et l’emplacement des relais de l’itinéraire que nous avons suivi. Après la grande rampe, l’itinéraire original évite le « headwall » compact par la droite et remonte un profond couloir dans lequel ruisselle abondamment l’eau de fonte du glacier sommital. Les petites natures que nous sommes choisiront plutôt de contourner le « headwall » par la gauche afin de gagner le sommet par la très classique et non moins esthétique Arête Sud (D, 400m, V sup., 18.08.1935 par A. CASTELLI et M. RIVERO).

La face et le futuriste bivouac qui date de 2011 (2833m) sont visibles depuis le Val Ferret. Le bivouac initial avait été construit en 1948 en l’honneur de G. GERVASUTTI mort deux ans plus tôt. Au terme d’une montée bien raide (quelques cordes fixes en place), nous atteignons le pied du promontoire rocheux sur lequel est posée la capsule du bivouac :

Olivier s’apprête à rejoindre le module lunaire à pas de géant…

L’intérieur est tout aussi futuriste que l’extérieur, avec vue panoramique sur la rive gauche du Val Ferret et son refuge BONATTI(justement…) :

Au levé du jour nous entamons la courte marche d’approche sur le glacier tortueux de Frébouze :

Nous franchissons la rimaye. Un unique petit pont de neige est le bienvenu pour nous poser exactement au départ de la voie :

Les pieds au sec, nous nous équipons :

Olivier se lance dans notre première grande longueur (L1+L2 « officielles »). Elle présente quelques pas bien physiques. Cependant la cotation reste modeste (autour du 5b).

Très vite le soleil réchauffe l’ambiance. Dès l’attaque de notre seconde longueur (L3+L4 « officielles ») les couleurs se font plus chaudes. C’est l’avantage de se trouver dans une face Sud-Est, nous allons nous régaler !

A la troisième longueur nous attaquons le magnifique dièdre de 70m qui caractérise la partie inférieure de l’itinéraire. Nous le gravirons en 2 longueurs. Olivier s’élance dans la première (6a puis 6b) :

La partie finale de la longueur quitte le fond du dièdre par une traversée dalleuse bien fine et délicate (6b) :

La seconde longueur du dièdre de 70m est superbe. Il s’agit d’un dièdre parfait à remonter en « dülfer« . Les pitons y sont nombreux mais fortement vieillissants du fait probable d’une humidité persistante. L’escalade y est d’autant plus physique que la longueur est presque entièrement mouillée. Fort heureusement pour nos petits bras, le passage clef à la sortie du dièdre, lui, est sec.

La courte longueur suivante, notre L5, nous a surpris. Elle présente beaucoup d’éléments déterminant un caractère malcommode : contournement d’angle parfaitement lisse, genoux dans les mentons, têtes coincées sous un toit… Bref, ce modeste 6a ne s’est pas laissé grimper sans résistance :

La suite est plus classique. Après avoir contourné par la droite le petit toit au-dessus du relai (bien visible sur la photo ci-dessous), nous remontons un très beau mur fissuré. L’escalade est géniale !

La longueur suivante est incroyable. Vue du bas, elle paraît très compacte et peu « prisue ». Au relai, avant de commencer l’escalade, nous nous plaisons à imaginer que les ouvreurs se soient posé nombres de questions avant d’y déchiffrer l’astucieux cheminement. Mais, monnayant quelques pieds-mains bien placés au départ, il y a en réalité juste ce qu’il faut pour grimper relativement aisément cette superbe longueur en ascendance à droite. Olivier se lance (désolé pour la mauvaise qualité des photos) :

Un peu au-dessus à droite d’Olivier sur la photo, dans les topos italiens vous trouverez indiqué « finta clessidra » (fausse clepsydre, faux sablier). Il s’agit en réalité d’une illusion d’optique laissant imaginer la présence d’une lunule créée par le rapprochement de deux petits blocs. En revanche, la plaquette de la voie « Pantagruel » positionnée exactement entre ces deux blocs est bien réelle (NB: si vous passez un jour par-là, ne grimpez pas jusqu’à cette fausse lunule et cette vraie plaquette).

Le haut de la même longueur vue de R7 (la qualité des photos prises par Olivier est excellente, ouf !) :

Au deux tiers de la paroi nous traversons franchement à gauche par des vires plus ou moins marquées afin de rejoindre l’Arête Sud (plutôt moins que plus sur cette photo) :

L’Arête Sud est bien redressée. Elle offre encore de beaux mouvements d’escalade (V sup. max.) :

A l’approche du sommet, l’arête finit par se coucher. Dommage, nous en aurions bien demandé un peu plus.

Après l’Arête Sud, il faut suivre une petite calotte neigeuse en direction du vrai sommet. Les averses de neige qui apparaîtront quelques minutes après la photo ci-dessous nous incitent à rejoindre la voie normale de descente sans y passer.

La descente sur le versant Est alterne de la marche dans les blocs…

Puis de petites désescalades (plus impressionnantes que réellement difficiles)…

Pour terminer par deux courts rappels de 20m…

Qui nous déposent sur le glacier de Frébouze en face de l’Aiguille de Leschaux (3759m) :

La partie inférieure et tempérée du glacier nous demandera encore quelques précautions pour le franchissement de quelques belles crevasses :

La suite de la descente est assez rapide car très directe dans cet immense cirque de Frébouze. Cette passerelle amovible est la bienvenue pour traversée facilement la puissante Doire de Ferret (point côté 1733m) et rejoindre la voiture. A certaines périodes, la traversée s’effectue au moyen d’une tyrolienne !

Avec Olivier, nous nous sommes régalés pendant cette belle course, vivement la prochaine !!!!!!

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